Si le CES tente de surfer sur cette dynamique qui a vu l’innovation envahir tous les secteurs, on est bien loin d’un salon du digital tant son origine « objet électronique » y est omni-présente. Les salons du digital ont pu ainsi fleurir de par le monde avec parfois quelques symposiums fortement spécialisés (Money2020, Dreamforce, Web Summit…). Vivatech s’impose comme la référence en Europe pour la tech innovante. En attestent ses 124 000 visiteurs (+24%) qui ne déméritent pas face aux 182 000 du dernier CES (+1%).
On a pu admirer les progrès de la reconnaissance d’émotion (Sensing feeling et sa reconnaissance des visiteurs en temps réel), une vision du luxe (LVMH et son sac avec un écran Oled), l’imagination du sport connecté.
Dans un coin, il y avait même une Batmobile — taille réelle — qui trainait pour vanter… une société de conseil.
Que trouve-t-on à Vivatech ? Un peu de tout en fait et c’est là que le visiteur doit faire attention : s’il ne sait pas ce qu’il cherche, il peut avoir du mal à s’y retrouver tant le salon manque de cohérence dans son organisation géographique. Il y a beaucoup de grandes entreprises (celles qui paient—cher—les plus grands et beaux emplacements) qui accueillent quelques startups de leur écosystème. Et pour montrer un écosystème le plus grand possible, ça part dans tous les sens. Vous pouvez trouver une société au stand d’Engie et son concurrent chez RATP. Le Crédit Agricole présentait 48 pépites sur le Stand des Villages by CA (Alveole, Leocare, Hubware…).
Quête de sens ?
Les GAFA sont bien représentés avec Google et Facebook. Sur leur espace, on sent qu’on y projette une façon de vivre dans sa maison ou avec sa communauté. Le message porté par ces stands est clair : on est au-delà de la société technologique, ce sont des façons de vivre le monde pour le rendre meilleur. C’est la promesse notamment de sa nouvelle version du casque de VR, le Hololens 2 intégrant le eye-tracking.
Jack Ma, le patron d’Alibaba (avec son stand également) ne disait pas autre chose : « c’est simple, mon objectif est de rendre les gens heureux ».
De plus en plus, miroir de notre société, Vivatech évolue avec elle. La préoccupation d’éthique et d’écologie se retrouve au hasard des travées. Le concept de « tech for good » prend sa place progressivement. L’avenir pourrait être bien plus favorable que prévu par les premiers Cassandre de la technologie. Un exemple avec une certaine vision de la médecine d’avenir : micro-chirurgie assistée (Da Vinci), exosquelette (Twiive), télé-médecine, miroir détectant les évolutions des grains de beauté dans le dos (CareOs), prédire les ruptures d’anévrisme (Nurea)… Certains étaient déjà là l’an dernier mais on mesure les progrès.
Les nouveaux acteurs de la smart city y paraissent très actifs, poussés par leurs sponsors (Engie, RATP, quelques régions représentées), que se soit pour le transport individuel (vélo, trottinette) ou pour gérer les flux dans la ville. On y retrouve aussi l’e-administration avec des décalages parfois étonnants comme ce stand de la DGSE où les pancartes « interdits de photographier » peuvent surprendre sur un événement public de cette nature.
Des gros et des petits
IBM y présentait les possibilités de son ordinateur quantique. Il n’y a rien à voir en fait (cloud oblige), mais on peut désormais tout y imaginer tant la puissance de calcul en sera décuplée.
Côté finance, la BNPP, la Banque Postale, la Société Générale et donc le Crédit Agricole étaient bien présents. Sur leur stand, on y parlait finalement assez peu de banque et de plus en plus de partenaires de vie. Quelques simulateurs de prêts, une néobanque Pro (Qonto), un neoassureur (Luko), une banque des adolescents (Xaalys) et des Bank-as-a-service rappellent bien où nous sommes. La Poste proposait Jaab, un porte-monnaie électronique en forme ludique pour les enfants connecté à l’app des parents.
Au fil des rencontres, on voit encore quelques drones. L’IA et les objets connectés se racontent de plus en plus en cas d’usage (casque pour mieux dormir et e-santé, mini-trackers et industrie 4.0…). On est certes à un salon de l’innovation, mais la technique cède le pas à l’apport de valeur client. Tant mieux ! On sentait moins cette évolution lors des précédentes saisons. Pour la blockchain, c’est encore un peu compliqué même si le smart contrat et la certification (Aura) deviennent aussi des réalités tangibles.
Pour les petites sociétés Tech, c’est aussi une occasion unique de se faire voir et de générer des rencontres. Homeric de Sarthe, le patron de Pitchboy, startup de la formation créée il y a quelques mois avec sa solution impliquant réalité virtuelle et IA, raconte y avoir fait plus de 300 rencontres en trois jours. Inimaginable dans la « vraie » vie.
À marcher dans les allées, on s’amuse à retrouver des startups de Vivatech 2016 devenue de belles entreprises et des nouveaux venus qui cherchent à bousculer les anciens avec des idées lumineuses. Tout le monde sait que la moitié ne seront plus là dans quelques années, mais ce n’est pas bien grave.
En tout cas, c’est indéniablement le plus bel endroit pour mesurer l’énergie de la #FrenchTech face au reste du monde, certes avec un prisme national. Mais avec le regard tourné résolument vers l’avenir.