12 Jan, 2025 | Article

Maximilien Nayaradou, Directeur Général de Finance Innovation : « il y a des opportunités pour les investisseurs avec de très belles boîtes sous-valorisées » 

Finance Innovation est un pôle de compétitivité créé par l’État en 2007 pour accompagner le développement de l’écosystème fintech français. Rencontre avec son directeur général, Maximilien Nayaradou, pour partager ses observations et ses surprises en ce début d’année.

Économiste de formation, Maximilien Nayaradou a fait sa thèse à l’Université Paris Dauphine avant de rejoindre Finance Innovation en 2010. L’organisme a pour première activité, la labellisation des solutions à travers six comités Assurance, Banque, Finance Durable et Solidaire, Gestion d’Actifs, Gestion et Finance d’Entreprise et Immobilier. Dans chacun d’entre eux, dix à vingt experts analysent les projets selon trois critères majeurs.

« Pour qu’un projet soit labellisé, résume Maximilien Nayaradou, il faut qu’il soit innovant, stratégique et crédible. Pour être innovant, il doit enlever des verrous de R&D, technologiques ou d’usage. Il est stratégique s’il apporte quelque chose à l’écosystème. Quant à la crédibilité, cela s’évalue sur l’équipe, sa capacité à générer du business ou à lever des fonds. ». Une fois la labellisation obtenue, les entreprises lauréates du label R&D collaboratives peuvent prétendre à des subventions et accéder à des fonds publics. Pour les entreprises lauréates du label individuel, l’obtention de prêt à taux 0, de fonds régionaux (petits montants de subventions) est possible, le label individuel permet aussi d’aider les start-ups à trouver des clients B to B ou à lever des fonds privés.

L’autre grande activité de Finance Innovation se manifeste sous la forme d’un réseau professionnel fédéré comme un cluster, notamment au travers de grands événements à l’image de l’InsurDay 2024 qui avait lieu au parc des Princes. 

 

Des opportunités pour les investisseurs

En observateur assidu de l’écosystème fintech, Maximilien Nayaradou n’a de cesse d’être surpris par les appréciations néophytes sur le monde des affaires et leurs conséquences directes. « Ce qui est compréhensible par le grand public va bénéficier d’une visibilité disproportionnée par rapport à la réalité du business. » Il cite ainsi l’exemple du financement participatif, phénomène de société très largement amplifié par son traitement médiatique, alors même que d’autres secteurs plus porteurs restent dans l’ombre.

« Je suis surpris que l’on ne parle pas plus des outils de financement du BFR par exemple. Nous avons labellisé de nombreuses entreprises du domaine, il y a énormément d’innovations, des fonds de dette qui sont levés… mais cela reste globalement méconnu. »

De la même manière, la PropTech et l’InsurTech ont mis très longtemps à émerger dans le paysage médiatique, alors même que Finance Innovation s’y intéressait depuis presque dix ans. La perception de l’écosystème et des dynamiques à l’œuvre serait donc biaisée par les sujets les plus accessibles qui captent l’attention du grand public et de ses observateurs, générant des effets de mode qui ne sont pas toujours justifiés. 

« La bonne nouvelle, annonce le directeur général de Finance Innovation, c’est qu’il y a des opportunités pour les investisseurs avec de très belles boîtes sous-valorisées. Avec des métiers de niche très innovants et performants qui ont autant de mal à entrer dans le champ cognitif du grand public, que celui des investisseurs et des grandes fortunes. » 

 

L’effet Luko sur l’Insurtech

De la même manière, Maximilien Nayaradou regrette que les difficultés rencontrées par Luko l’an dernier servent souvent à illustrer la dynamique de cet écosystème, et rappelle que nous avons tendance à résumer un secteur à l’aune de ses grandes réussites ou de ses grands échecs, masquant parfois la réalité du terrain.

« J’ai récemment eu une discussion avec des investisseurs qui semblaient faire une croix sur l’insurtech. J’avais pourtant envie de leur dire que c’est normal que certaines boîtes fassent faillite. C’est évidemment préjudiciable pour les investisseurs lorsqu’ils perdent de l’argent, mais je connais en parallèle de nombreuses entreprises qui sur-performent dans cet écosystème. »

Maximilien Nayaradou nous invite donc à aller au-delà du bruit pour nous rapprocher de la source : ne pas toujours s’arrêter à la perception donnée par les grands titres, mais venir comprendre un écosystème dans sa globalité, avec ses échecs retentissants, mais aussi ses réussites invisibles.

 

L’optimisme des entrepreneurs

Après bientôt deux décennies passées dans cet écosystème, le directeur général de Finance Innovation reste étonné par l’énergie déployée par les entrepreneurs qu’il rencontre. 

« Nous sommes encore dans un contexte économique complexe, explique-t-il. Il y a pourtant toujours des entrepreneurs qui se lancent. Je ne vais pas forcément dire que c’est contracyclique, mais c’est décorrélé du cycle. Je trouve cela inspirant de voir la psychologie de ces entrepreneurs qui, qu’ils fassent beau ou mauvais temps, se lancent avec optimisme pour réinventer un secteur. »

LFB
Valentin Pringuay