12 Juil, 2024 | Article

Du sumérien à GPT : Le retour du Langage Naturel

Le langage naturel connaît aujourd'hui une renaissance grâce aux avancées spectaculaires de l'intelligence artificielle générative.

Le langage écrit, pillier civilisationnel

Depuis les premières tablettes sumériennes jusqu’aux manuscrits médiévaux, en passant par l’invention de l’imprimerie par Gutenberg, le langage écrit a été un pilier fondamental de notre civilisation. Depuis sa création, l’intelligence artificielle a franchi de nombreuses étapes majeures, mais c’est l’émergence des algorithmes de type Transformer qui marque un tournant décisif, réaffirmant l’importance primordiale du langage naturel. Cette évolution nous montre que, paradoxalement, la technologie la plus avancée permet de revenir à la simplicité et à l’efficacité du langage que nous utilisons depuis des millénaires.

La fin des barrières technologiques ?

Dans les années 1950, les premiers systèmes basiques de simulation de pensée humaine ont été automatisés. Les décennies suivantes ont vu l’émergence des réseaux de neurones artificiels, puis du deep learning, offrant une capacité sans précédent à imiter le raisonnement humain, à traiter des problèmes complexes, et même à identifier des solutions qui n’auraient été découvertes qu’après des années de recherche.

Cependant, pourquoi cette IA ne s’est-elle pas déployée plus rapidement et plus largement dans notre société ? Au-delà des capacités des machines, ce sont aussi les compétences nécessaires et les délais de mise en œuvre au sein d’infrastructures spécialisées qui ont freiné ce mouvement. Bien qu’un puissant écosystème se soit créé, les entreprises spécialisées en data et IA étaient peu connues et mal comprises.

Le tournant GPT

Tout a changé avec l’arrivée des architectures Transformer comme BERT de Google et GPT d’OpenAI. Ces algorithmes se distinguent par leur capacité à permettre une compréhension contextuelle plus profonde et une génération de texte plus cohérente. En utilisant le langage naturel comme variable d’entrée et de sortie, ces modèles rendent les interactions avec les machines plus naturelles et intuitives sans avoir recours à des protocoles de communication ad hoc et coûteux à créer.

Les IA génératives montrent que le langage humain peut servir de pont universel entre les machines, une véritable révolution pour les spécialistes de la technologie. Souvent jugé imprécis par rapport aux langages informatiques stricts, le langage naturel trouve désormais une nouvelle pertinence. Cela simplifie non seulement l’intégration des technologies, mais enrichit également l’interaction homme-machine, rendant les outils technologiques plus accessibles et intuitifs pour les utilisateurs non spécialisés. 

Vers une humanité augmentée par l’IA ?

En abolissant les barrières linguistiques, l’IA générative efface la frontière non seulement entre machine et humain, mais surtout, et c’est peut-être son impact le plus significatif, entre les humains eux-mêmes. Cette IA, qui est loin d’avoir atteint ses pleines capacités, accessible à tous, révolutionne déjà la communication mondiale en permettant une traduction fluide des langues, ouvrant ainsi la voie à des interactions sans précédent entre humains de tous continents, de toutes cultures et de tous âges.

Si un peuple se reconnaît notamment par sa langue, en abolissant la frontière du langage, l’IA générative favorisera-t-elle le sentiment que l’humanité ne forme au fond qu’un seul peuple ? En connectant les diverses cultures et communautés à travers une communication sans entrave, cette technologie pourrait bien renforcer l’idée d’une humanité de plus en plus globale, et pourquoi pas unie dans sa diversité.

Emmanuel Papadacci-Stephanopoli