Dans quel monde voulons-nous vivre demain ? Les choix que nous faisons aujourd’hui font notre futur. Ces choix nous les faisons déjà au quotidien en tant que consommateurs et consommatrices, lorsque nous refusons la consommation de masse et préférons les alternatives durables. Mais nous ne les faisons pas encore avec notre épargne. Pourtant notre argent est magique. Il a encore un plus grand pouvoir que notre consommation pour faire bouger les choses. Voilà le postulat duquel Maud Caillaux et ses associés sont partis pour construire Green-Got, une néobanque verte et décarbonée.
À votre avis de combien de degrés la température a-t-elle augmenté depuis la dernière ère glaciaire, il y a 20 000 ans ? 5 degrés. 5 degrés c’est peu, mais 5 degrés cela suffit déjà pour provoquer un désastre environnemental.
L’intention de Green-Got est donc claire. L’urgence écologique est là, et il faut agir avec force. Pour accélérer la transition vers un monde plus vert, la finance a aussi un rôle à jouer et pas des moindres. L’idée, sur le papier, est pourtant assez simple : réorienter radicalement les flux de capitaux vers les acteurs de la transition écologique et faire prendre conscience aux gens que leur argent qui dort à la banque, finance encore largement des industries très polluantes comme le charbon ou le pétrole.
Pour ce faire, cette néobanque – en phase de lancement et clairement à part dans le paysage de la fintech française – a de grandes ambitions : éveiller les consciences sur la manière dont l’épargne des Français est utilisée par les banques traditionnelles et révolutionner la manière dont les gens conçoivent leur épargne pour – entre autres – couper les vivres aux acteurs des énergies fossiles.
Le succès est indiscutable, puisque 25 000 personnes ont déjà commandé leur carte bancaire MasterCard Green-Got (en bois ou en plastique recyclé) et que 100 000 personnes suivent leur ascension sur les réseaux.
Un compte qui en épargne plus d’un
Green-Got proposera un compte courant et un compte épargne orienté vers les grands piliers de la transition écologique.
Le compte courant aura un impact environnemental léger, car la nature liquide de ce compte ne permet pas l’investissement. “On a une très grosse communauté, et c’est important d’avoir un produit tout en un tout public qui soit rassurant” explique Maud Caillaux.
Du côté des comptes épargnes, l’objectif est plus ambitieux. Les dépôts seront orientés à 100% vers des investissements en fonds labellisés ISR ou encore Greenfin (cela concerne une cinquantaine de fonds) et resoumis à une méthodologie interne pour être sûr de la “verdicité” des investissements. Greenfin est favorisé, car plus sélectif dans la démarche de notation extra-financière et d’interprétation des critères environnementaux.
On peut noter que les fonds labellisés Greenfin excluent d’emblée les énergies fossiles et obligent 75% des capitaux sous gestion à être investis directement dans les grandes activités de la transition : gestion des déchets, traitement de l’eau, agriculture durable, etc.
Suivre les émissions de CO2 de ses dépenses quotidiennes
« À chaque fois qu’un client paye avec sa carte, le client peut prendre connaissance en temps réel des émissions de CO2 que ses dépenses génèrent. »
Le client bénéficiera donc d’un regard avisé sur son impact écologique et des efforts qu’il met en œuvre (ou qu’il doit mettre en œuvre) pour le diminuer.
Cela lui permettra, en outre, de réduire sa consommation superflue en surveillant ses émissions de CO2 et en améliorant la qualité écologique de ses dépenses.
Une expansion sans publicité et un business model non motivé par le profit à tout prix
Pour arriver à la communauté dont elle peut se prévaloir aujourd’hui, Green-Got a tracé son chemin sans engager de frais publicitaires. La néobanque au renard s’est fait connaître par le bouche-à-oreille et les réseaux sociaux, notamment en impliquant ses abonnés dans ses prises de décisions (AB Test sur différents types de cartes, de logos…). Résultat : une communauté de fans super engagés toujours plus grande et acquise de manière 100% organique, avec environ 20 000 abonnés sur Linkedin, 18 000 sur Instagram ou encore 60 000 sur Tiktok.
“Nos sujets pédago’ sur TikTok recueillent une très belle résonance. Notre rôle est d’éveiller à ces sujets importants en faisant la passerelle entre les longs PDF d’ONG un peu barbants que personne ne lit, et le grand public”.
Maud explique ce succès par un concours de chance et de timing : “On est arrivés quand l’épargne responsable était encore très méconnue. Et depuis quelques temps, c’est devenu un sujet qui passionne les médias.”
Du côté des financements, la néobanque peut compter sur des financements de business angel privés. Et pour faire tourner la boutique, elle profitera des commissions d’interchange et de l’abonnement mensuel à 6 euros auquel pourront souscrire les clients.
À chaque paiement, une partie des commissions d’interchange est reversée à des associations que la communauté choisit via un annuaire. L’avantage, pour les clients, c’est aussi que les paiements en devises étrangères sont sans frais, partout dans le monde !
L’heureux mariage entre capitalisme et écologie
Maud Caillaux avoue qu’elle a du mal à se projeter sur 5 ans. L’objectif de Green-Got n’est clairement pas le profit, et son ambition est justement de parvenir à s’étendre en dépit d’une étonnante sobriété et d’objectifs surtout extra-financiers.
Pour Green-Got, il s’agit avant tout d’opérer vite, pour que les industries hyperpolluantes disparaissent sans tarder et qu’on puisse respecter les accords de Paris.
« Si toutes les banques se mettaient à être vertueuses et que cela impliquerait la fin de Green-Got : Tant mieux. Cela voudrait dire que notre mission est accomplie. »
Qui est Maud Caillaux ?
Maud Caillaux est communicante de formation. Après l’obtention d’un master à l’école de management de Grenoble, elle s’oriente vers une carrière dans le luxe et travaille un temps pour des Maisons tels que Dior et Berluti. Puis, par le fruit du hasard, Maud s’envole outre-Atlantique et se voit confier en 2018 un poste dans la finance à Manhattan. C’est là qu’elle fait ses armes dans un milieu qui lui était jusqu’alors inconnu. Après une vive introspection, initiée par un événement personnel, elle prend conscience de l’urgence du réchauffement climatique et se lance en 2020 dans un projet de néobanque décarbonée avec quelques associés. Ensemble, dans un esprit participatif et citoyen, ils co-fondent Green-Got !